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Le joueur de mots

Le joueur de mots, Alfred Gilder. Éditions Glyphe, 239 pages, 15€.

Dès les premières pages de son livre, sous-titré « dico du français amusant », Alfred Gilder annonce la couleur : « Je n’ai aucun lien avec Gilles d’Haire, né en Asie, je suis d’extrême mot riant ». Dire que notre auteur pratique le jeu de mots relève de l’euphémisme. Au sens propre, un jeu de mots désigne n’importe quel jeu de langage manipulant avec entrain mots et sonorités. Qui le pratique utilise à dessein le malencontreux kakemphaton – son crâne était tout vert – et l’équivoque janoniste : des danseuses blanches sur le dos de chevaux en tutu. Si notre cher Alfred se contentait de ces quelques écarts, volontaires et fortuits, notre santé mentale ne serait pas en péril. Mais le coquin fait flèche de tout bois. Pêle-mêle et par ordre alphabétique, il a recours à l’acronyme récursif et à l’acrostiche, à l’allographe et à l’ambigramme, à l’anacyclique, à l’anagramme, à l’antonomase, à l’auto-traduction, au bigramme et à la boutade, à la cacographie, au cadavre exquis, au calembour, à la charade, au cratylisme, à la contrepèterie, au dingbat et au faux proverbe, à l’homéotéleute, à l’homophonie, au lipogramme, au mot-valise, au néologisme, au palindrome, au pangramme, à la paronymie, au poème holorime, à la polysémie, au rétroacronyme, au trompe-oreilles, sans oublier le nippon shiritori, le toc toc toc, et la virelangue. S’embarquer à bord de cette nef du fou, c’est l’assurance d’un voyage merveilleux en compagnie de ces mots dont Céline disait qu’on « ne se méfiait jamais assez » et que Victor Hugo qualifiait de « passants mystérieux de l’âme ». Dans sa belle préface, Jean Orizet, intègre à juste titre, Alfred Gilder, dans la tribu des Foudémots. Nous pourrions ajouter qu’il en est le chef incontesté.

Gérard de Cortanze