Un amour d'espion

de Clément BENECH (Flammarion)

Un livre intelligent, construit, et fort amusant. L'esprit ne manque certes pas à son jeune auteur qui a plus d'un tour dans son sac à malice. Notamment, l'idée de faire traîner l'intrigue, car elle ne se dévoile que le récit déjà avancé. Les premières lignes surprennent, enlevées, drôles, elles vous précipitent dans un modernisme exacerbé. Les dialogues ressemblent à des SMS endiablés concentrés sur l'histoire, la science, la philosophie et la psychanalyse.

Ce jeune auteur sans avoir l'air d'y toucher, et qui parle à la première personne, prend une distance étonnante par rapport aux faits d'une époque. En vérité, fausse distance, car il sait analyser notre société, notre monde et les produits qui en résultent avec discernement, mais avec un indiscutable humour qui pourrait – à chacun son humour – faire parfois penser à Houellebecq, moins une certaine grossièreté, ou à Philippe Roth.

Ce qui me semble fondateur et très habile, c'est que Clément Bénéch fait preuve d'un lyrisme fort beau (pages d'amour) qui se glisse dans le texte là où l'on ne l'attendait pas.

Mais aussi malicieux soit le clin d’œil, il sacrifie à la mode actuelle par des descriptions détaillées du sordide qui n'apportent rien à cet ouvrage. La fin aussi est surprenante dans tous les termes.

Constat en guise de conclusion  : une rencontre heureuse avec un écrivain dont on ne peut que se réjouir d'attendre le prochain livre.

Claudine HELFT