L'Après-midi du Livre
Inscriptions à l'Après-midi du Livre du samedi 8 juin 2024
Qui se tiendra dans les Salons d’Honneur de la Garde Républicaine de 14 H 30 à 18 H 30
Garde Républicaine, 22 boulevard Henri IV – Paris 4e
Présentation de la Carte d’identité obligatoire
Comment est née notre Après-midi du Livre
Le récit du président Pierre Chanlaine
En 1966, Pierre Chanlaine, président de l’A.E.C., a consacré la « Gazette » de l’Association à l’histoire de notre Après-midi du Livre. On fêtait alors son 40e anniversaire. Voici ce qu’il écrivait :
« Cela me permet d’abord, déclare Pierre Chanlaine, de souligner que nous avons été, de très loin, les créateurs de ces ventes de livres dédicacés, qu’on voit maintenant partout (...). Je me suis chargé de vous raconter cette histoire parce qu’au Comité de l’Association, je suis le seul survivant de cette époque déjà lointaine.
L’AEC partageait alors le bureau d’une association au nom « sternutatoire », le SCUF, c’est-à-dire Sporting Club Universitaire de France. Secrétariat composé d’un père et de sa fille, le père répondant à toute question « Je ne sais pas », la fille qui ne connaissait ni la sténo, ni le classement élémentaire, devait dans le nouveau contrat travailler et être payée aussi par l’AEC.
Huit jours plus tard, en effet, tout était réglé. Nous eûmes, rue du faubourg Saint-Honoré, un très beau bureau et une bonne secrétaire. Mais l’euphorie ne devait pas durer. Il fallait trouver de l’argent pour couvrir les frais. Et vite !
Et Pierre Chanlaine de poursuivre :
« Nous parlâmes, au Comité, de nos difficultés financières. Et je me hasardai à faire une suggestion.
- J’ai rencontré hier, dis-je, un metteur en scène qui s’appelle Tavano et avec lequel j’ai eu la bonne fortune de traiter une ou deux affaires de cinéma.
Il vient d’acheter La Chaussée des Géants de Pierre Benoit et je suis convaincu que le producteur nous prêterait le film pour une présentation payante, si nous pouvions disposer d’un grand théâtre.
L’idée fut retenue. »
Le projet fut réalisé. L’AEC obtint le théâtre Mogador – 1 300 places –. On fit une publicité monstre.
Des invitations furent lancées notamment à Albin Michel, l’éditeur du livre, et à de nombreuses personnalités comme André de Fouquières. La salle, quoique assez remplie, était loin d’être comble. Les calculs furent vite faits.
« Il allait falloir donner au théâtre de l’argent que nous n’avions pas. C’était tragique. Thierry Sandre était consterné et prêt à faire retomber sur moi la responsabilité de cet échec. Je gardai pourtant mon sang-froid. Une phrase de Chateaubriand me revint à la mémoire : « On peut se prosterner dans la poussière quand on a commis une faute. Mais il n’est pas besoin d’y rester ».
« Non seulement Albin Michel était dans la salle, mais il avait amené une secrétaire avec quelques exemplaires de la « Chaussée des Géants ». Je m’emparai de l’un d’eux. Après quoi, j’allai trouver André de Fouquières qui s’était installé dans une loge d’orchestre.
Un livre aux enchères
- Mon cher ami, lui dis-je, je veux vous demander un grand service. Et je suis sûr que vous allez nous le rendre.
- De quoi s’agit-il ?
- Le film qu’on vous présente comporte deux parties séparées par un entracte, voulez-vous mettre aux enchères un exemplaire de la Chaussée des Géants. Cet exemplaire sera dédicacé par Pierre Benoît au nom de celui qui aura acquis le livre.
André de Fouquières n’était pas enthousiaste. J’insistai. Il accepta. J’allai trouver Pierre Benoît qui n’était pas encore académicien et qui occupait une loge voisine. Je lui demandai son accord et il me le donna.
Quand vint l’entracte, je poussai André de Fouquières sur le plateau. Il fit lui-même l’annonce nécessaire. Et les enchères montèrent étrangement. Elles atteignirent une somme qui valait à peu près cinquante mille francs de nos anciens francs. C’était plus que celle dont nous avions besoin pour combler l’insuffisance de nos recettes. Nous étions sauvés. »
« L’intéressante idée » de Marcel Priollet
« (...) Parmi les spectateurs, au théâtre Mogador, il y avait un de nos camarades qui s’appelait Marcel Priollet.
Marcel Priollet vint un jour rendre visite à Thierry Sandre et lui dit à peu près ceci :
Ce qui m’a frappé dans la séance de Mogador, c’est la somme atteinte par le livre mis aux enchères. Cette somme est de plus de 70 fois supérieure à la valeur marchande du livre. Incontestablement, c’est la dédicace de Pierre Benoît qui a entraîné cette finale enchère. Dans ces conditions, ne pourrait-on pas organiser une séance, où les auteurs viendraient vendre eux-mêmes leurs livres en les dédicaçant au nom de l’acheteur ?
Thierry Sandre trouva l’idée intéressante. Mais bien entendu il était nécessaire qu’il la soumît au Comité. Or, les vacances arrivaient...
À la rentrée, je constatai que plusieurs de mes camarades, sans s’opposer à l’idée de Marcel Priollet, ne l’accueillaient pas avec enthousiasme. Ils prétendaient qu’en vendant à un public très large des livres dédicacés, on allait diminuer considérablement la valeur des dédicaces.
Au Comité, on convoqua Marcel Priollet pour qu’il défende son idée. Il fut très persuasif, très éloquent, et comme à l’accoutumée, très simple.
Le principe d’une vente de livres dédicacés fut acquis, non à l’unanimité, mais à la majorité. »
Restait à trouver le lieu d’une telle vente.
« Nous pensâmes à une maison de couture qui aurait, dans une manifestation de cet ordre, l’occasion de présenter ses modèles. C’est ainsi que j’allai trouver les directeurs de la Maison Philippe et Gaston, 120, avenue des Champs-Elysées. M. Philippe Hecht et Gaston Kaufmann me promirent d’accueillir les membres de l’Association (...). Cette première manifestation que nous appelâmes l’Après-midi du Livre eut lieu le samedi 12 décembre 1925. Nous eûmes beaucoup de monde... » Et une très belle recette.
Pierre Chanlaine (1885-1969)